Leur cartable : Benoît Heimermann

Benoît Heimermann - Mercredi 13 Juillet 2016
L’ESSENTIEL
C’est en retournant à l’école (pour accompagner mon fils) que je me suis aperçu que le cartable appartenait à une histoire révolue. A en juger par la disparité des sacs, sacoches, musettes, besaces, serviettes, leurs formes dissemblables, leurs couleurs contradictoires, leurs modes de suspension singuliers qui, sur une épaule ou sur deux, qui, souples ou rigides, qui même, équipés d’un système de roulettes sophistiquées et d’une poignée télescopique à l’avenant, je me rende à l’évidence : les temps avaient changé et le transport des savoirs avec eux. A recenser toutes ces options et tous ces choix, il sautait aux yeux que la liberté et l’indépendance étaient à l’ordre du jour, tout au moins en apparence. Chaque élève avec, de surcroît, un surplus de colifichets, d’écussons, de tags, de porte-clefs bien distincts se distinguaient et se singularisaient à l’infini. Une ou deux générations plus tôt, nous n’étions que norme et conformisme. Nos cartables étaient parallélépipédiques, de teintes sombres et agrémentés, au mieux, de deux bretelles pas si éloignées de celles utilisées par nos propres pères. Je devais l’admettre : nos progénitures avaient chamboulé les modes et les principes. La preuve : le contenu de leurs bagages avait lui-même évolué. Méthode globale, calculettes électroniques, QCR, travaux appliqués : c’est vers la modernité que frayait désormais un enseignement qui, en d’autres temps, se félicitait simplement d’être classique.
Le voici donc désormais connecté (le fameux cartable !). Avec le monde qui va, le temps qui passe et l’avenir qui, forcément, nous promet encore bien davantage. On ne peut que s’en féliciter ! Modifier l’enveloppe, réactualiser ce qu’elle contient : qui n’adhérerait pas à un tel programme ? S’ouvrir vers l’ailleurs et être en phase avec les différences voilà un challenge qui ne peut que nous séduire. Espérons simplement que les privilégiés qui en profiteront n’oublient pas, dans le même temps, l’essentiel : les vingt-six lettres de l’alphabet, les tables de multiplication et les règles du savoir-vivre qui, elles aussi, elles surtout, font une bonne éducation.
Benoît Heimermann - Écrivain
Auteur de : Femmes des pôles ( Édition Paulsen)